Mars 2023. Depuis plusieurs jours la vallée de l’Arve connait un épisode de pollution aux particules fines assez particulier. Même si les niveaux de particules fines restent à des niveaux équivalents à ceux mesurés dans les agglomérations de Sallanches et Passy lors de l’épisode de pollution de février 2023, l’effet de la pollution est beaucoup visible puisqu’il est presque impossible de voir les massifs montagneux autour de Passy et de Sallanches les 2 et 3 mars 2023. A Chamonix de fortes valeurs de PM10 sont mesurées les 2 et 3 mars 2023.
La visibilité est très mauvaise en Vallée de l’Arve les 2 et 3 mars 2023
Le Mont-Blanc a presque disparu de la vue depuis Sallanches en vallée de l’Arve le jeudi 2 mars 2023 comme le montre cette photo prise à la sortie de la ville en direction de Domancy et de Saint-Gervais les Bains.
Côté Passy ce n’est pas mieux le vendredi 3 mars où l’on n’aperçoit plus bien la chaîne des Aravis.
La visibilité est bonne au-dessus de 1500 mètres et en haute montagne
En revanche, lorsqu’on prend un peu de hauteur, on peut apercevoir de nouveau les massifs montagneux au-dessus du brouillard présent dans le fond des vallées. Pour le plus grand bonheur des amoureux des sports d’hiver, l’air en montagne est encore pur.
Lire l’article sur l’analyse des radiosondages pour la qualité de l’air
Au-dessus de Chamonix le ciel est dégagé en haute montagne sans voile de poussières ni nuage le 3 mars 2023 comme le monde la photo suivante prise à 3400 mètres d’altitude.
Le nitrate d’ammonium responsable de la mauvaise visibilité
En période anticyclonique, avec la reprise des activités agricoles au printemps et l’épandage de lisiers dans les champs, de l’ammoniac est émis en grande quantité.
L’ammoniac est un gaz issu en grande partie de l’urée contenue dans les lisiers déversée dans les champs par les activités agricoles. Avec des températures supérieures à 15 ° C, l’hydrolyse de l’urée est rapide et les concentrations d’ammoniac dans le sol augmentent, facilitant la volatilisation de l’ammoniac dans l’atmosphère (lire un article sur la production de l’ammoniac à partir des engrais azotés). En présence de radiation solaire en période anticyclonique et de réchauffement de la surface des sols en journée, l’ammoniac est émis en grande quantité dans l’atmosphère.
Dans des masses d’air polluées riches en oxydes d’azote (NOx) émis par les combustions, majoritairement le trafic automobile, les oxydes azote vont se combiner à l’ammoniac dans certaines conditions d’humidité et de température pour former des particules de nitrate d’ammonium. Ces particules se trouvent parmi les plus fines : les PM2.5. Les conditions atmosphériques favorables à l’apparition du nitrate d’ammonium sont optimales lors de périodes anticycloniques au printemps et en automne .
Les particules de nitrate d’ammonium se combine avec la vapeur d’eau contenue dans les basses couches de l’atmosphère et diffusent fortement le rayonnement direct du soleil. Cette diffusion est à l’origine de la mauvaise visibilité.
Cette pollution par les particules de nitrate d’ammonium se combine à la pollution par les autres particules fines rejetées dans l’atmosphère par les activités humaines, notamment le chauffage, le trafic routier et les activités industrielles.
Et que disent les mesures de qualité de l’air ?
Du côté des mesures de qualité de l’air réalisées par Atmo Auvergne Rhône Alpes, les niveaux de pollution en particules fines mesurés dans la vallée de l’Arve à Passy dépassent le seuil réglementaire pour les PM10 le 2 mars 2023 avec 52 µg/m³ en moyenne journalière. Toujours à Passy, les concentrations en PM2.5 atteignent 44 µg/m³ en moyenne journalière le 2 mars 2023. Les concentrations en particules fines le 2 mars 2023 dépassent les niveaux mesurés lors du dernier épisode de pollution en février 2023. Pour mémoire, l’OMS préconise depuis 2021 de ne pas dépasser une concentration en PM2.5 de 15 µg/m³ en moyenne journalière pour limiter les impacts sanitaires de la pollution de l’air.
De fortes valeurs de PM10 à Chamonix les 2 et 3 mars 2023
De fortes valeurs en particules fines PM10 ont été mesurées au centre ville de Chamonix les 2 et 3 mars 2023. Ces valeurs ne sont pas mesurées aux Bossons, preuve qu’il s’agit d’une pollution très localisée ou d’un artefact de mesure.
Avertissement : les données de mesures de particules fines PM10 et PM2.5 à fréquence horaire produite par les AASQA Atmo ne sont pas exploitables en l’état mais donnent une information en temps-réel, seules les données moyennées sur 24 heures (en moyenne journalière) sont exploitables après la validation des données et ont une valeur réglementaire. Il faut donc rester prudent sur l’exploitation des données horaires des particules fines PM10 et PM2.5.
Un épisode de pollution à l’échelle de la France métropolitaine
Au l’échelle de la France métropolitaine, la pollution aux particules fines PM2.5 est forte sur une grande partie du pays. Il ne s’agit donc pas d’une pollution limitée à la vallée de l’Arve mais généralisée à de nombreuses régions françaises. Seules les régions des côtes de la Manche, les régions montagneuses et le pourtour méditerranéen semblent pour le moment épargnés par cet épisode de pollution de grande ampleur.
Des analyses complémentaires de la composition chimique des particules pourront affirmer la responsabilité du nitrate d’ammonium dans cet épisode de pollution. A suivre donc.
Pour tout savoir sur la qualité de l’air, n’hésitez pas à consulter Mes Formations sur la Qualité de l’Air.